Version imprimable de Jacques Ellul et la révolution nécessaire
José Ardillo
Jacques Ellul et la révolution nécessaire
Tiré de La liberté dans un monde fragile, L’Échappée, 2018
Traduit de l’espagnol par Sonia Balidian
Au sein d’une œuvre ample et variée, appartenant selon les cas à la sociologie critique, la théologie, l’histoire du droit ou de la propagande, et ne reculant pas le cas échéant devant la polémique intellectuelle, Ellul se consacra au début des années 1970 à une étude exhaustive du concept de « révolution », à travers ses deux livres Autopsie de la révolution (1969) et De la révolution aux révoltes (1972). Il leur en ajouta un troisième en 1982 avec Changer de révolution, qui revêt un grand intérêt car il constitue un point d’inflexion sur la question de la technologie, par rapport aux positions qu’il avait développées depuis les années 1950.
Dans les années 1930, Ellul faisait partie avec son ami Bernard Charbonneau du petit mouvement personnaliste, un courant intellectuel qui à cette époque s’opposait tout autant au fascisme et au communisme qu’à la société libérale. Rapidement, ces deux auteurs prirent toutefois des distances avec ledit mouvement, entre autres à cause de mésententes avec Emmanuel Mounier qui était son chef de file (1). Pendant la guerre, Ellul fut exclu de son poste dans l’enseignement par le gouvernement de Pétain, et il pratiqua l’agriculture pendant un temps, participant à la Résistance sans toutefois prendre les armes. Après la guerre, il reprit le professorat et participa de nouveau à des groupes de réflexion aux côtés de son ami Charbonneau. C’est ainsi qu’en 1962, ayant fait parvenir à Guy Debord son livre Propagandes, et constatant que ce livre était très apprécié des situationnistes, il en vint à leur proposer sa collaboration. Pourtant, cette proposition sera repoussée par le groupe à cause de sa foi chrétienne.