Aurélien Berlan, « Pour en finir avec l’alternative “Progrès” ou “Réaction” »

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Aurélien Berlan
Pour en finir avec l’alternative « Progrès » ou « Réaction »

Article publié dans le numéro 6 de la revue L’An 02 en automne 2014,
repris sur le site A contretemps le 30 décembre 2015.

Il arrive souvent, chez les gens « de gauche », de penser que toute critique du « Progrès » (dans ses dimensions actuellement dominantes, celles du développement économique, scientifique et technologique) est forcément « réactionnaire », au sens où elle serait « de droite » et ferait le jeu des élites capitalistes. C’est notamment la position de Jacques Rancière qui dénonce aujourd’hui, au nom de l’égalité, toute critique des formes de vie modernes en termes d’aliénation – qu’il s’agisse de celle de Debord ou de celle de Finkielkraut, mises dans le même sac. Cette position nous semble intenable dans la mesure où les formes de vie modernes, basées sur le salariat et la consommation de masse, supposent des inégalités terribles entre les nations et au sein de chacune d’elles et où le « Progrès », économique et technoscientifique, fait en réalité le jeu du capitalisme.

Si l’on revient aux débats qui ont eu lieu dans l’Allemagne de 1900, où la révolution industrielle a été particulièrement rapide et brutale, on remarque une configuration qui peut nous aider à sortir de l’alternative désuète, héritée de la Révolution française, entre Progrès et Réaction, entre Rancière et Finkielkraut. Face au nouveau monde industriel engendré par le capitalisme, deux courants d’idées se faisaient alors concurrence : la critique sociale et la critique culturelle. Une critique pertinente du capitalisme nous semble aujourd’hui devoir articuler ces deux approches, sociale et culturelle. C’est la condition sine qua non pour sortir de l’alternative infernale « Progrès » ou « Réaction ». (suite…)