Jean-Marc Mandosio
Foucaultphiles et foucaulâtres
(Addendum à l’ouvrage Longévité d’une imposture, Michel Foucault
aux éditions de l’Encyclopédie des Nuisances.)
Pourquoi s’en prendre à Michel Foucault ? Parce que le culte qui lui est voué, en France et à peu près partout ailleurs dans le monde (plus même peut-être qu’en France), constitue une excellente illustration du « dessèchement de la pensée par la répétition paresseuse de sempiternels lieux communs ou par une frénésie conceptualisatrice faisant souvent fi de toute rigueur » (1). Il m’est apparu d’autant plus nécessaire de mettre l’accent sur la banalité et l’incohérence des idées de Foucault que celui-ci passe, aux yeux de ses thuriféraires, pour le parangon de l’audace intellectuelle et de la rigueur conceptuelle. En exposant l’imposture consistant à présenter des lieux communs comme des nouveautés révolutionnaires et à ériger en modèle de rationalité un discours flou et inconsistant, j’ai voulu contribuer à la réhabilitation de l’esprit critique, pour lequel il n’existe pas de vaches sacrées.
Quoique assurément minoritaire, cette démarche n’est pas totalement isolée. Il y a une dizaine d’années, Sokal et Bricmont avaient bruyamment dénoncé, au grand dam des partisans de la French Theory, l’invraisemblable quantité de pseudo-concepts, et parfois la véritable confusion mentale, que l’on pouvait trouver chez certains des collègues de Foucault les plus en vue (2). En Italie, je me suis trouvé très proche d’auteurs tels que Piergiorgio Bellocchio et Alfonso Berardinelli (animateurs de la revue Diario de 1985 à 1993) ou Filippo La Porta (3), qui ont développé, chacun à sa manière, la défense du « sens commun » exprimée par Raffaele La Capria dans son essai intitulé La Mouche dans la bouteille (4). J’ai tenté de les faire connaître en France (5), mais ce type de critique n’a jamais trouvé beaucoup d’amateurs au pays des 365 fromages – il suffit de voir combien l’œuvre de George Orwell est marginalisée dans la culture française –, où l’on se contente le plus souvent de l’assimiler à un vulgaire anti-intellectualisme, ce qui permet de se débarrasser des questions posées sans même les prendre en considération.
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