D.H. Lawrence, par Renaud Garcia (Bibliothèque verte de Pièces et main-d’œuvre)

Version imprimable de D.H. Lawrence

Mis en ligne par Pièces et main-d’œuvre sur leur site le 9 décembre 2020

 

Un peu par hasard, et pour donner de quoi lire au lecteur, nous avons pris le pli de grouper ces notices par diptyques. Ray Bradbury constituant l’exception – mais nous y avions joint l’une de ses nouvelles, à peu près inconnue. Dès le début ce fut aussi un jeu que d’assembler ces couples, en fonction de quelque ressemblance ou dissemblance, d’accord ou d’opposition, en laissant au lecteur le soin de discerner pourquoi diable nous avions réuni deux auteurs que rien ne semblait relier. Nous pourrions reconstituer ces paires de toute autre manière et non moins motivée. Nous pourrions publier des trios de notices, ou derechef, une seule à la fois, ou encore suivant un tout autre principe – vous verrez.

Pour Landauer et Lawrence, c’est facile : suivez la femme. Pas n’importe quelle femme ; Frieda von Richthofen. Mais qui est-ce ? Que vient-elle faire entre Lawrence et Landauer ? Le lien, lecteur, la liane. Le serpent du sexe, du sensible et de la sensualité, ramenant les hommes à leur « état primitif de fils du soleil » (A. R.). Pardon pour ces allitérations faciles, mais il faut bien qu’on se fasse plaisir, nous aussi.
Sinon nos deux auteurs pensent comme Flaubert : « J’appelle bourgeois, tout ce qui pense bassement. » C’est-à-dire que tous deux vomissent non seulement le capitalisme – c’est la moindre des choses – mais au-delà, l’industrialisme noirâtre, avec ses usines dont leurs camarades anarchistes et communistes rêvent de s’emparer, et cette répression des corps que l’on associe à l’époque dite « victorienne ». Ces deux solitaires, révoltés viscéraux, furent des éclaireurs de l’immense révolte sexuelle et naturienne qui advint des décennies après leurs morts prématurées. Et voilà pourquoi ils appartiennent à notre galerie d’anciens.

David Herbert Lawrence
(1885-1930)

 

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Gustav Landauer, par Renaud Garcia (Bibliothèque verte de Pièces et main-d’œuvre)

Version imprimable de Gustav Landauer

Gustav Landauer
(1870-1919)

Mis en ligne par Pièces et main-d’œuvre sur leur site le 9 décembre 2020

Né en 1870 à Karlsruhe, dans une famille de commerçants juifs, le philosophe, poète et anarchiste allemand Gustav Landauer fut révolutionnaire sa vie durant. Mais ni en raison d’une appartenance de classe, ni pour lutter avec acharnement pour sa subsistance. Au fil d’une scolarité exemplaire dans un lycée de l’Allemagne bismarckienne, il trompe l’ennui en dévorant Goethe, Hölderlin, puis, lors de ses études de philologie moderne, Schopenhauer, Nietzsche et Ibsen. Autrement dit les pourfendeurs des « philistins », ces individus bornés, aux préoccupations essentiellement matérielles, auxquels il oppose l’aspiration romantique. Le voici prêt, lui, l’intellectuel, à découvrir la littérature socialiste. Il n’est certes pas ouvriériste. Ce n’est pas le point de vue de classe qui le rapproche du socialisme, mais la critique de la mesquinerie bourgeoise ; de la glace qu’elle répand sur les relations humaines. Féru de littérature et de théâtre, il se lance dans toutes sortes d’initiatives culturelles. D’abord tenté par une carrière académique en philosophie, il y renonce pour exercer sa pensée au plus près de la réalité sociale, dans le but de la transformer culturellement. A 23 ans, les polices de l’empire le considèrent comme l’agitateur le plus important du mouvement révolutionnaire en Allemagne. Il collabore à plusieurs journaux, participe à la fondation de théâtres populaires, essuie des peines de prison au tournant du siècle pour incitation à l’action révolutionnaire. Période frénétique et épuisante.

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